Les petites News de Nickie Trebor

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Panique à Bruxelles Midi (fiction)

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Il pleut!

Il pleut comme il pleut partout et toujours en Belgique.

Elle aurait tellement aimer naître dans un autre pays au climat plus doux, plus chaud, plus ensoleillé.

 

Ce matin, comme chaque matin, Elisabeth revêt son uniforme composé d'une robe et d'une veste bleu très foncé, le tout relevé d'un foulard rayé bleu roy et bleu foncé. Elle enfile ses bas et ses chaussures assorties au tailleur. Elle attrape manteau, coiffe et sacs et file au travail au volant de sa petite voiture verte.

Par ce temps maussade, elle pense "mais que suis-je donc venue faire dans cette galère?"

Elle a soit trop froid à l'extérieur soit trop chaud à l'intérieur. Mais le plus irritant, c'est l'humidité constante de ses vêtements qui lui grattent la peau, comme si son uniforme voulait lui faire une seconde peau. Non, décidément, ce matin, Elisabeth n'a vraiment pas envie d'aller au turbin.

Enfin! Pas le choix, elle n'est pas née avec une cuillère en argent dans la bouche. Un salaire est nécessaire à sa vie, à sa survie.

 

Un peu moins d'une demi-heure de route plus tard, elle rentre au bureau et prend son service. Quatre collègues sont présents; Sabine, la petite boule de nerf; Adrien, l'intello un peu raseur; Romuald, le charmeur et Alice, la bimbo. Chacun et chacune se prépare pour commencer sa journée après avoir échangé quelques propos sympathiques,... ou pas. Elisabeth n'a cure de tous ces ragots, elle ne les écoute ni ne les sème.

 

Il est cinq heures trente, il fait encore nuit en ce lundi du mois de mars. Elisabeth se rend à son premier train. Elle adresse un signe de la main au conducteur en guise de bonjour et assure le départ.

Elle se dirige vers sa cabine et annonce le détail du voyage dans l'interphone afin de tenir les voyageurs informés. Le train s'élance lentement d'abord puis de plus en plus vite vers Bruxelles; tadam, tadam,... tadam, tadam,...

Il y aura cinq arrêts avant d'atteindre la capitale. Elisabeth passe contrôler les titres de transport que lui tendent mollement les navetteurs entre veille et sommeil. Le contrôle est terminé. Dans dix minutes ils atteindront le terminus. Elisabeth, de la fenêtre de sa cabine, regarde défiler le paysage et attend le bon moment pour annoncer dans l'interphone, l'arrivée imminente dans la dernière station, Bruxelles Midi.

Des étendues de verdures et de champs sont suivies de sites commerciaux et industriels.

 

Voici Bruxelles. Elisabeth descend du train et marche vers l'escalier mécanique, métallique qui la conduit dans le ventre de la gare du midi. Là où elle va enfin pouvoir boire un bon café, manger un croissant et un yaourt aux fruits, prendre un bon petit-déjeuner bien mérité. Elle passe sa commande dans une cafétéria bien connue des employés du chemin de fer puis s'installe seule avec son petit déj. à une table pour deux. Le siège libre lui sert à y déposer ses manteau, sacs et écharpe. Elle occupe l'autre chaise en face de son plateau. Tout en dégustant son croissant trempé dans le café, elle se plonge dans la lecture de "Danse macabre" de Stephen King. Elle aime les thrillers du maître du genre.

Tout à sa lecture, elle ressent une démangeaison dans la nuque. Elle se gratte de la main gauche tandis que la droite continue de s'occuper du petit-déjeuner. Elle ramène sa main gauche vers son livre afin de le garder ouvert à la bonne page, "Aucune émotion ne transparaissait  sur son visage. Il observait le plafond d'un blanc uni comme s'il voyait s'animer des scènes et des images."  Ses yeux descendent le long de la page 178 et s'attardent sur le bout de ses doigts. Elisabeth hésite, elle est médusée, ses dernières phalanges semblent bleues. Elle ressent une douleur vive, ses articulations ne répondent plus. Ses ongles foncent, s'allongent, durcissent.

 

Immédiatement Elisabeth jette son livre dans un sac, attrape son manteau et son écharpe et file aux toilettes. Elle s'enferme dans un des cabinets, elle a chaud, beaucoup trop chaud. Ses vêtements l'étouffent. Elle se déshabille rapidos. Elle regarde ses mains, ses pieds, ses ongles sont maintenant devenus des griffes noires. Son corps est recouvert de poils d'un bleu profond et brillant. Elle peut apercevoir son reflet dans l'inox du porte rouleaux de papier wc. Elisabeth est stupéfaite, elle s'est transformée en une splendide chatte élancée au pelage bleu intense. Au dessus de son petit museau aux longues moustaches noires trônent deux yeux d'un beau vert turquoise. Son regard est transperçant. Soudain, on frappe à la porte: "Z'en avez encore pour longtemps! Hey, dix minutes qu'vous êtes la d'dans. J'dois y aller moi!" Elisabeth répond d'un "Krrsssshhhh" très puissant. Elle ne peut plus parler et crache comme un chat en colère, ses poils se hérissent dans le dos.

"Oh mon dieu, mais qu'est-ce qui m'arrive?" 

Elle abandonne ses effets et s'élance un à un au dessus des cinq cabinets de toilette qui la séparent de la sortie. A toute vitesse, elle traverse l'allée centrale de la gare. Paniqués, les voyageurs, croyant qu'une panthère s'est évadée d'un zoo, courent en tous sens en hurlant. La police du rail est appelée au secours. Il est trop tard, Elisabeth a filé dans le dédale des couloirs. Elle se cache, se terre, observe. Elle a faim, son corps réclame de la chair. Planquée derrière les poubelles dans un couloir exigu et mal éclairé, la chatte Liz scrute l'horizon, le hall de gare. Les passants sont toujours affairés mais calmés. Des policiers du rails accompagnés d'un vétérinaire sont à sa recherche afin de la capturer.

 

Elisabeth se dégage de son trou. Elle se déplace, féline. A pattes de velours elle s'approche de la lumière. Un tout jeune garçon comme paralysé de peur la regarde, elle le fixe de son étrange regard turquoise. "Ne bouge pas, ne crie pas", pense-t-elle. Le gamin porte une main à son front et reste là sans bouger tel une statue. Elle le touche précautionneusement de sa patte avant droite. Il reste figé, il est vivant mais ses yeux sont révulsés et il respire très lentement. Il est dur comme de la pierre. Elle a un don, ses yeux, son regard est une arme. Elle dépasse le petit Billy qui reprend vie peu à peu et se met à pleurer.

Deux couloirs plus loin, la chatte Liz aperçoit un groupe de policiers lui foncer dessus. Elle les fixe du regard et s'imagine des belles grosses souris géantes et succulentes. Et voilà que sous les uniformes s'agitent quatre rongeurs ahuris. Liz n'écoutant que sa faim s'élance vers les souris qui s'enfuient en tous sens. La chatte subtile et adroite en a attrapé une avec qui elle joue entre ses pattes. Elle approche ses crocs vers la malheureuse qui n'en mène pas large. Et, au moment où elle allait croquer sa proie, elle ressent une douleur dans la nuque.

 

Quelque chose l'agrippe, la secoue. 

-Madame, Madame, réveillez-vous. Votre train va partir!

Elisabeth, la tête écrasée sur son livre, se réveille. Il est temps qu'elle reprenne son service et se dirige vers son deuxième train de la journée.

-Oh, merci beaucoup, lance-t-elle à la serveuse.

Elle range son livre dans son sac. Songeuse, le sourire au bord des lèvres, elle prend ses affaires et se dirige vers le quai numéro dix.

Elle reprend ses esprits et son service.

Prochaine étape, Liège.

 



21/12/2021
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